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Ma dose de cinéma

Les Trois Mousquetaires : d'Artagnan - A la hauteur des attentes

Publié le 1 Septembre 2023 par Gaffeur in Historique, Aventures, Eva Green, Vincent Cassel, Romain Duris, François Civil, Pio Marmaï

Un casting qui envoie tout de même du lourd

Un casting qui envoie tout de même du lourd

Je me rappelle encore de cette sensation lorsque Pathé a annoncé une nouvelle adaptation des Trois Mousquetaires sur grand écran. 
D'un côté je me disais qu'il était temps que notre patrimoine littéraire soit adapté par nous (parce que cela faisait tout de même un demi siècle que seuls les américains et les anglais revisitaient le roman de Dumas), mais de l'autre je n'étais pas forcément convaincu que le budget suivrait et que Martin Bourboulon serait le réalisateur idéal. 

Ce n'est pas que j'ai détesté les deux Papa ou Maman qui étaient de sympathiques comédies, mais justement passer de la comédie au blockbuster historique me semblait un pari assez risqué d'autant que Eiffel qui marquait la première expérience historique du cinéaste avait reçu un accueil plutôt tiède. 

Et puis en avril dernier est sorti le premier volet du diptyque à 70 millions d'euros, et pour la première fois depuis longtemps un cinéaste a su faire rimer qualité avec succès. 

Je craignais que le film ne subisse le même échec que L'Empereur de Paris de Richet qui s'était pris une belle taule en dépit d'une ambition folle et d'une réalisation efficace, mais la promo des Trois Mousquetaires a su attiser la curiosité du public avec à la clé plus de trois millions d'entrées !

A l'époque de la sortie j'avais vraiment apprécié le film mais j'étais tout de même ressorti un peu frustré avec ce sentiment de Dune sauce Villeneuve qui ne donnait que les prémices de l'intrigue et qui m'avait laissé sur ma faim. Aujourd'hui le film est enfin disponible en DVD et c'est l'occasion pour moi de porter un nouveau jugement et pour ceux qui l'auraient raté en salles de rattraper leur erreur afin de pouvoir découvrir la partie deux au cinéma en décembre ! 

Y'a pas à dire on est loin de l'époque des collants !

Y'a pas à dire on est loin de l'époque des collants !

L'artillerie lourde

On nous avait promis à grands renforts de trailers à l'américaine et d'annonces d'une grosse montagne d'euros de financement que le film serait la renaissance du cinéma de cape et d'épée.
Un registre tombé aux oubliettes depuis des lustres et qui pourrait être qualifié de ringard par le plus jeune public, on parle tout de même d'une époque où les collants étaient monnaie courante et où les répliques étaient très théâtrales. 

Ecrit par Mathieu Delaporte et Alexandre de la Patellière, cette nouvelle mouture des Trois Mousquetaires dépoussière non seulement le genre mais également le film d'aventures made in France (oui Monsieur Canet c'est vous que je vise bien que votre Astérix n'était pas si mauvais).

Les dialogues sont dépourvus de ce côté "vieillot" et ont été légèrement modernisés pour plus de pep's bien que l'écriture ne trahisse pas l'époque à laquelle est sensée se dérouler l'histoire. 

Les répliques font mouche et la reconstitution se veut proche des grosses machines historiques avec des décors lugubres et des costumes sombres qui ne donnent pas l'impression d'assister au spectacle de fin d'année de l'école du quartier. 

Martin Bourboulon a très bien employé chaque centime pour rendre son film spectaculaire et ne jamais donner la sensation de manquer de budget. Le film est non seulement ambitieux, mais en plus le budget alloué a été suffisant pour que ses ambitions portent leurs fruits : il y a des figurants partout, la réalisation friande de plans-séquences pendant les combats, des effets spéciaux et des cascades bien sentis... C'est certain, on n'avait jamais vu ça de la part d'un cinéaste français depuis bien longtemps !

22 v'là les mousquetaires !

Mais là où le film va surprendre c'est en ce qui concerne la modernité de son approche du livre de Dumas. L'intrigue reste la même avec cette rivalité entre les mousquetaires et les gardes du cardinal, l'affaire des ferrets de la Reine, les magouilles de Richelieu et Milady qui fout le bordel, mais Bourboulon a choisi un angle assez original dans le sens où nous sommes quasiment dans un film de flics !

Le QG des mousquetaires avec ces mines patibulaires font ainsi penser à un 36 quai des orfèvres avant l'heure où un ancêtre d'Olivier Marchal aurait donné le ton aux autres membres du corps. 

Devant déjouer un complot politique et enquêter sur différents personnages tout en rendant des comptes à leur hiérarchie après l'avoir ignorée, nos mousquetaires deviennent presque des agents secrets au service du Roi. 

Beaucoup d'entre nous ont joué les mousquetaires lorsqu'ils étaient gosses, aussi est-ce un véritable bonheur de voir ces gars là prendre vie sous une version bien badass sous les traits de Pio Marmaï, Vincent Cassel, Romain Duris et François Civil qui décidément est excellent qu'importe le registre. 

Cassel sera toutefois celui qui convaincra le mieux car habitués aux rôles de polars il saura apporter à Athos ce côté vétéran fatigué mais pas rouillé comme les bons vieux flics des polars de Verneuil et Melville. 

Ca bouge souvent dans le film, pour notre plus grand plaisir !

Ca bouge souvent dans le film, pour notre plus grand plaisir !

Mené tambour battant

Cette écriture à la sauce policière ne sera pas qu'originale, elle sera même carrément bien pensée car permettant à l'histoire de se dérouler à un rythme tout simplement parfait. 

On commence par une scène d'action pluvieuse pour filer sur Paris avant d'enchaîner sur le triple duel, puis très vite un mousquetaire sera accusé de meurtre tandis que le cardinal va commencer à déplacer ses pièces sur l'échiquier... Le film ne dispose finalement que de peu de temps morts, et même lorsque les épées retrouvent leurs fourreaux il y aura toujours une avancée pour les personnages ou un rebondissement pour garder toute l'attention du public jusqu'à la fin !

Le spectacle sera par ailleurs généreux car de mémoire je crois bien qu'aucune autre adaptation n'avait proposé autant d'action, et surtout aussi bien mise en scène.

On pourrait parfois se dire que les plans-séquences sont un peu serrés et misent sur le hors champ pour économiser un peu le budget (après tout le deuxième volet devrait réserver une grosse scène de guerre donc on peut comprendre) mais les chorégraphies restent nerveuses et le fait que les comédiens ne soient pas doublés à 90% du temps aide à ressentir la tension des combats. 

L'aspect prologue qui frustre quand même un peu

Lorsqu'un film est aussi bien rythmé, écrit et filmé on en veut fatalement plus ! Et certes on l'aura bel et bien dans quelques mois étant donné que les deux films ont été tournés en même temps (évitant ainsi la connerie d'une trilogie marseillaise par Daniel Auteuil qui n'aura jamais de conclusion) mais ce premier volet souffre cruellement de ce côté prologue de luxe.

L'intrigue reste palpitante mais hélas on ne peut s'empêcher de désamorcer les twists amenés par le dernier acte (franchement qui n'a pas compris pour la romance de Athos ou pour l'identité du conspirateur surpris par Constance ?) mais qu'on nous sert pour justifier la construction en deux parties. 

A l'instar du Dune de Villeneuve, D'Artagnan passionne autant qu'il frustre car on sent que l'histoire ne veut pas non plus aller trop loin pour l'instant car il faut garder des rebondissements sous le coude pour la suite. 

Maintenant est-ce que le procédé sera pertinent ? L'écriture saura-t-elle permettre à la seconde partie d'avoir de quoi tenir deux heures sans longueurs et proposer un rythme aussi fou que ce premier volet ? 

Dans le genre bonne surprise : Louis XIII par Louis Garrel

Dans le genre bonne surprise : Louis XIII par Louis Garrel

D'Artagnan est non seulement bel et bien ce qu'on nous a promis, mais aussi bien plus que ce que l'on attendait ! 
Enfin un film historique made in France qui se donne les moyens et qui ne manque pas le coche en matière de spectacle (sans vouloir cracher dessus c'était un peu le reproche de L'Empereur de Paris qui était très chiche et expéditif en combats).

La relecture est fidèle, moderne et le casting se permet en plus quelques extravagances bienvenues : on songe notamment à Louis Garrel qui campe un roi loin des idées reçues du monarque de droit divin dans ses somptueux costumes et qui apporte en prime une petite note d'humour inattendue et agréable (il n'y a qu'à voir à quel point Romain Duris a du mal à garder son calme pendant la tirade finale du roi pendant leur première entrevue) tandis qu'Eva Green bien qu'en retrait pour le moment connaît bien ses gammes de femme fatale. 

D'Artagnan est une excellente surprise à tous les niveaux, qu'il faudra cependant réévaluer une fois que l'histoire sera complète en espérant que la suite ne vienne pas gâcher un pareil tableau, ce qui serait aussi étonnant que déconcertant.

En tout cas la suite n'est pas encore arrivée que déjà on nous annonce une nouvelle version du Comte de Monte-Cristo... Une chose est certaine, maintenant qu'il y en a un qui a marché les producteurs vont exploiter le filon du film de cape et d'épée pendant quelques temps ! 

Mais si chaque projet a cette ambition et cette qualité, on ne va clairement pas s'en plaindre. 

Note : 4/5

 

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