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Ma dose de cinéma

Une affaire d'honneur - Eclipsé par les Mousquetaires

Publié le 27 Avril 2024 par Gaffeur in Historique, Drame,, Roschdy Zem

Pas de bol pour Vincent Perez, son film a de la gueule

Pas de bol pour Vincent Perez, son film a de la gueule

Aaaah les duels à l'épée ! 
Voilà le genre de figure qui sonne tout de suite français et qui a donné lieu à énormément de grand moments de cinéma. Rien d'anormal donc à ce que Vincent Perez consacre un film entier sur ce genre de combat, lui qui en tant qu'acteur a de nombreuses fois eu l'occasion de se frotter au cinéma de cape et épée.

Malheureusement pour lui Une Affaire d'Honneur son quatrième long métrage n'a pas rencontré le succès et pour cause il est sorti au pire moment qui soi pour un projet de ce genre : fin décembre 2023.

Oui, oui ! Fin décembre 2023 donc à Noël où le public va privilégier le film familial ou le blockbuster avec des machines redoutables comme l'excellent Wonka mais aussi Les Trois Mousquetaires : Milady qui sortait pour sa part seulement quelques semaines plus tôt. 

Du coup évidemment que quand le public a le choix entre un film à 30 millions d'euros dont la première partie a été très appréciée et un film bien plus modeste qui allez savoir pourrait être encore un film d'auteur bien chiant, bah le public va voir le gros truc à 30 millions. 

Résultat malgré des critiques favorables et des avis d'escrimeurs très enthousiastes le film n'a pas réussi à faire face au mastodonte de Pathé et a terminé sa course avec moins de 200 000 entrées.

Et avec le recul c'est bien dommage parce que bien que le film ne soit pas à proprement parler un film de cape et épée il excelle bien mieux que le blockbuster de Martin Bourboulon dans le domaine de l'épée justement. 

Plutôt audacieux, Perez s'offre le rôle du méchant

Plutôt audacieux, Perez s'offre le rôle du méchant

Paris 1887

A la fin du XIXème siècle les affronts et les outrages où l'honneur aurait été mis en cause ne se règlent que par le duel à l'épée ou au pistolet. 
Lorsque le neveu du maître d'armes Clément Lacaze s'en prend à un général pour une histoire de coeur, le jeune garçon n'a d'autre choix que de s'entraîner au maximum pour l'emporter contre un vétéran de la guerre et des duels. Pendant ce temps Madame Marie-Rose Astié compte bien bouleverser les codes et permettre aux femmes en plus de porter un pantalon de pouvoir participer aux duels pour défendre leur honneur elles-mêmes. 

L'arc principal de l'intrigue ne sera pas le plus complexe qui soit : un général a été offensé et demande réparation avec un duel, comme le duel tourne mal Lacaze demande un nouveau duel, ce qui blesse le propriétaire de son école qui va lui aussi demander un duel... Ce n'est effectivement pas bien recherché comme histoire mais ce genre de cercle vicieux fonctionne toujours très bien et on se demandera constamment quel sera le prétexte utilisé pour la prochaine joute et de quelle manière celle-ci se déroulera. 

Pour le coup il y a un petit (léger) côté Mort ou Vif dans le sens où l'action sera composée à 90% de duels mais malgré leur nombre de cinq chaque affrontement sera différent du précédent et aura ce petit quelque chose qui fait qu'on se prendra au jeu à chaque fois. 

Des moyens légers mais bien employés

On le ressent dans la photographie et par le fait que 95% des séquences se déroulent dans des lieux clos ou isolés le film n'est effectivement pas un blockbuster. 

Mais si le fait qu'il n'y ait jamais plus de six ou sept personnes à l'écran figurants inclus en dehors des duels et des entraînements peut donner un indice sur l'importance du budget du film cela n'empêchera pas Vincent Pérez d'assurer lorsqu'il s'agit de filmer le coeur de l'histoire : les combats. 

Beaucoup ont pesté à juste titre que Bourboulon avait gâché ses combats à l'épée en s'obstinant à faire des plans-séquences et en tournant en longue focale, et il faut bien le dire la deuxième partie des Mousquetaires m'a bien frustré en matière de combats à l'épée finalement assez rares. 

Pérez va ainsi faire notre bonheur en proposant des combats longs et dont la technique des combattants sera bien le coeur de chaque affrontement. 
Plutôt appréciés par les escrimeurs comme je le disais plus haut, les duels sont filmés de suffisamment près pour pouvoir sentir les pointes et les tranchantes tout en gardant tout de même le recul nécessaire pour que le cadreur ne sache plus trop ce qu'il doit filmer. 

Comme quoi pas besoin d'avoir 35 millions d'euros pour filmer un combat à l'épée efficacement et avec du suspense. 

Doria Tillier est excellente, mais son personnage sonne déjà vu

Doria Tillier est excellente, mais son personnage sonne déjà vu

Des personnages gâchés... Par notre époque

Honnêtement après l'original mais mollasson Seuls dans Berlin je suis forcé de reconnaître que Vincent Pérez s'est montré bien plus inspiré pour son quatrième long-métrage, ce qui est déjà en soi une excellente chose. 

Hélas pour lui il y a un aspect sur lequel son film ne passionne pas alors qu'il le voudrait : ses personnages. 
Alors attention je ne suis pas de ceux qui critiquent les choix de casting : Roschdy Zem n'a jamais été mauvais et depuis que je l'ai vue dans La Belle Epoque mon jugement sur Doria Tillier a bien évolué. 

Le problème vient tout simplement de notre époque. 
En effet cela fait presqu'une dizaine d'année qu'on nous matraque partout que les femmes sont opprimées, résultat l'histoire de Marie-Rose sonnera tellement déjà vue que j'ai eu du mal à vraiment m'y intéresser.

Parce que quand ça fait dix ans qu'on nous sert à toutes les sauces des personnages féminins qui brisent leur carcan etc et bah l'histoire de Astié n'apporte strictement rien de neuf au message. Et c'est terrible parce qu'on parle d'une époque où une femme n'avait pas le droit de porter un pantalon et où on considérait que l'honneur d'une femme ne pouvait qu'être défendu par un homme. 

C'est là tout le paradoxe des personnages du film : ils seraient en soit intéressants et certains seraient même audacieux une fois resitués dans leur époque (ce constat vaut aussi pour Lacaze qui en simple roturier doit affronter un militaire de carrière), mais on a l'impression d'avoir déjà tout entendu sur le sujet. 

Et alors cette romance forcée qui n'amène rien et ne mène à rien... Comment dire ? 

Un monde très codifié et surveillé de très près

Un monde très codifié et surveillé de très près

Sans avoir l'ambition de réaliser un blockbuster, Vincent Pérez ne tombe pas pour autant dans les travers du film d'auteur bien pompeux et chiant.

On sent l'âme du réalisateur et sa passion pour les combats à l'épée derrière chaque séquence où on peut apercevoir un fleuret ou un sabre, et quand un cinéaste met du coeur dans son film le résultat ne peut que toucher un minimum le public. 

Une Affaire d'Honneur ne marquera malheureusement pas l'histoire du cinéma de cape et épée et restera à jamais ce petit projet original et bien filmé qui a été mis KO par un blockbuster et parasité par son époque. 

Mais les curieux qui se décideront à lui donner sa chance en trouvant le DVD ou en le choisissant un soir sur la grille des programmes ne passeront pas un mauvais moment et frissonneront même un minimum pendant les passes d'armes. 

Note : 3/5

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