Parmi tous les chefs d'oeuvres ou à minima les pépites que nous ont proposé les animateurs et réalisateurs du sutdio Ghibli, il se cache parfois des films dont on ne soupçonnait pas la qualité et dont on se demande bien pourquoi ils ne sont pas cités plus souvent ?
Mimi wo Sumaseba par exemple qui est une histoire sans fantastique mais débordant de fantaisie et de douceur, en avez vous déjà entendu parler ?
D'un autre côté on imagine de la part du studio des histoires mettant en scène des créatures magiques, des monstres effrayants et des magiciennes cruelles et pas forcément des histoires plus terre-à-terre.
Arrietty : Le petit monde des chapardeurs est l'un des plus récents du studio (nous l'avons découvert en 2011) et on pourrait sans conteste le classer à côté du chef d'oeuvre de Yoshifumi Kondo.
Premier film réalisé par Hiromasa Yonebayashi, il s'agit en réalité d'une adaptation d'un roman intitulé The Borrowers (qu'on pourrait traduire texto par Les Emprunteurs) dont pour l'anecdote il existe déjà une adaptation cinématographique en live action avec Tom Felton avant Drago Malefoy.
Ainsi je découvre qu'il peut arriver au studio Ghibli de proposer des histoires pas forcément "maison", mais après tout si on parle d'adaptation et non pas de transposition c'est que le studio pouvait au passage y apporter sa patte.
J'ai pas rêvé j'avais un flan aux quetsches ?
Vous est-il déjà arrivé de vous demander où avez bien pu passer le trombone que vous aviez laissé sur votre bureau la veille ? Ne vous êtes vous pas déjà dit que lorsque vous l'aviez vue la veille sans vous servir la boîte de biscuits semblait mieux fermée ?
Dans les faits vous avez probablement affaire à un garnement noctambule, mais c'est à partir de ces petites questions que va se construire l'histoire d'Arrietty, une fille de 14 ans dont la particularité est d'être de l'espèce des Chapardeurs.
Petits êtres semblables à des humains, ces derniers vivent dans les fondations d'une maison de campagne japonaise et vivent grâce aux fournitures que le père pique aux humains pendant la nuit : un mouchoir en papier, un carré de sucre...
Arrietty a pour sa part hâte de sortir de sa cachette et d'accompagner son père afin d'explorer la maison des humains après s'être risquée plusieurs fois dans le jardin.
Mais les choses se compliquent lorsqu'un jeune garçon nouvellement arrivé dans la maison aperçoit la jeune fille furtivement.
Un visuel envoûtant
Malgré la simplicité apparente de l'intrigue force est de constater que le studio a su voir en l'histoire original un concept qui se marierait bien avec sa ligne éditoriale.
Une sorte de petite fée vivant au contact des insectes et de la nature tandis que les humains et leur modernité surplombent littéralement sa famille, il ne fallait pas chercher bien loin pour comprendre ce qui avait motivé les troupes de Miyazaki à adapter le roman !
Et comme d'habitude avec leurs productions le film va fourmiller de détails qui donneront une authenticité à cette aventure : une patte de grillon accrochée à la ceinture d'un chasseur, une pince à linge en guise de pince à cheveux, du scotch double-face pour pouvoir escalader les meubles...
On s'amuse à chaque séquence des trouvailles éparpillées un peu partout dans les décors, avec à chaque fois une petite dose d'humour (le faciès du corbeau lorsqu'il se fait battre par Haru est à se tordre) et surtout une poésie dont seuls les studios Ghibli sont capables : grâce à ce film même nos maisons deviennent le théâtre d'histoires fantastiques !
Une histoire qui repose
Si j'avais comparé le film à Si tu tends l'Oreille, ce n'était pas par envie de placer gratuitement l'un de mes favoris du studio mais bien parce que le ton de Arrietty se situe exactement dans la même veine.
L'histoire semble simpliste : des petits êtres vivent discrètement sous nos maisons, et si nous les apercevons et qu'ils le savent ils disparaîtront. Le film ne va d'ailleurs à aucun moment sortir de ce postulat et on pourrait grossièrement dire que toute l'intrigue est résumée dans son concept.
Mais au cours de l'heure et quart que constituera son histoire (ouais, c'est court et c'est bien là son seul défaut), Arrietty va se retrouver confrontée à plusieurs dilemmes et situations dangereuses qui donneront un côté épique. Pour nous ce ne sont que des chats ou des oiseaux, mais pour une personne de 10 cm de haut, c'est comme si elle était chargée par un rhinocéros ou un dragon !
Evidemment elle ne pourrait s'en sortir toute seule et l'arrivée de Sho va bouleverser son petit monde : le jeune garçon l'a aperçue deux fois, elle le sait. Mais ses intentions ne semblent pas hostiles, puisque celui-ci va même aller jusqu'à restituer le sucre chapardé par la fillette et son père et qu'ils avaient laissé tomber pendant leur fuite.
A moins de tomber dans une histoire glauque et sordide dont Charles Bukowski avait le secret, on ne peut pas permettre à deux individus séparés par 1m60 de vivre une romance.
Pourtant le film réussi à merveille à créer une complicité par delà les différences et la méfiance et à émouvoir de par la subtilité de certaines séquences.
Et le plus agréable dans tout cela, c'est qu'il n'y a pas vraiment d'antagoniste. A la limite il y aurait bien Haru qui est persuadée que des démons dérobent les affaires de la famille depuis des dizaines d'années, mais même lorsque celle-ci se trouve en position de force par rapport à nos chapardeurs ses intentions ne sont pas mortelles. Il s'agit juste de quelqu'un qui n'a plus d'étoiles dans les yeux et qui ne voit pas la poésie derrière la disparition d'un carré de sucre.
C'est sûr, on est loin des thématiques bien dark et matures que l'on peut trouver chez Mononoké ou Chihiro.
Mais d'un autre côté cette simplicité et la délicatesse avec laquelle elle a été traitée confèrent au film un côté incroyablement "chill" comme on dit aujourd'hui.
Vous avez eu une journée pourrie et vous voulez vous détendre sans violence ni méchanceté ? Alors Arrietty est le film qu'il vous faut !
Notons également que non seulement c'est l'un des rares films du studios à ne pas avoir fait appel à Joe Hisaishi pour sa bande son, mais qu'en plus celle-ci a été composée par une française !
Cécile Corbel avec sa harpe sublimera les sorties champêtres de la petite femme et prouvera une fois de plus que le Japon et la France sont fait pour s'entendre.
Note : 4/5