Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Ma dose de cinéma

Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages - Merci Monsieur Blier

Publié le 27 Janvier 2025 par Gaffeur in Comédie, Bernard Blier, Michel Audiard

Meilleur dialoguiste que réalisateur ? Hélas oui.

Meilleur dialoguiste que réalisateur ? Hélas oui.

Plus que les répliques cinglantes d'Alexandre Astier dans sa relecture de la quête du Graal, les textes de Michel Audiard font partie à coup sûr des plus cités parmi les conversations entre cinéphiles ou même au quotidien histoire de charrier un con au passage. 

Pourtant si j'ai toujours carburé aux répliques façon "Les cons, ça ose tout..." et autres "Je critique pas le côté farce, par contre pour le fairplay..." et que j'ai du voir une bonne trentaine de films dont les dialogues ont été signés par le gaillard, je n'avais encore jamais eu l'occasion de me frotter à un film mis en scène directement par l'auteur des Barbouzes et Tontons Flingueurs.

C'est que mine de rien quand un mec aussi célèbre que Audiard revient systématiquement lorsqu'il est question de cons ou de dialogues affutés on est en droit de se méfier quand à la qualité de ses propres films puisque personne n'en parle jamais, sauf peut être pour évoquer la longueur de leurs titres. 

A ce niveau là Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages (que je ne vais pas m'amuser à réécrire à chaque fois pour des raisons évidentes) ne risque pas de me contredire, mais derrière un titre aussi long se cache un film au contraire assez court.

1h15 minutes seulement. 

Bon, une durée rachitique et une réputation inexistante, ça commence mal mais avec un tel casting et Audiard à l'écriture ça ne pouvait pas être mauvais. 

Ce ne sont pas les costumes de Jobert qui ont du ruiner le projet

Ce ne sont pas les costumes de Jobert qui ont du ruiner le projet

Le coup classique...

Débutant par une image de la plastique de Marlène Jobert qui a du en laisser bon nombre tout chose à l'époque, l'intrigue du film est en soi assez convenue et le pitch pourrait à lui tout seul réunir tous les tenants et aboutissants de l'intrigue.

Il est question de Rita une jeune femme qu'on qualifiera poliment d'aguicheuse qui trahira sans vergogne le caïd qu'elle fréquentait afin d'obtenir une part importante du butin sur lequel ce dernier comptait mettre la main. 
Mais Charles le nouveau complice de Rita non content d'avoir doublé son rival se permet de laisser la miss sur la touche et de se faire la malle en gardant les lingots rien que pour lui. 

Mais Rita n'a pas dit son dernier mot et va trouver de l'aide auprès de sa tante Léontine qui aurait connu Al Capone et Lucky Luciano. 

... façon cartoon !

Des histoires de petits truands et de pilleurs de banques qui se doublent entre eux et battent le record du nombre de couteaux dans le dos, nous en avons vu des dizaines, beaucoup de cette époque ayant été justement dialoguées par Michel Audiard. 

On aurait ainsi pu s'attendre à un scénario plus original de la part d'un vétéran du polar comique, mais Audiard fait le choix d'une intrigue très convenue où tous les rebondissements ou presque se sentent venir à plusieurs kilomètres. 

Mais qu'importe l'idée d'Audiard n'était pas le fond mais bien la forme avec une mise en scène pour le moins inattendue. 

Les comédies de voyous de cette période jouent toujours sur leurs dialogues exquis pour amuser et à l'occasion placent quelques gags visuels pour pimenter le rythme (on se souvient du running gag du cadavre flottant dans La Métamorphose des Cloportes) mais Audiard avait dans l'idée pour ce film de dynamiter les codes en jouant au maximum sur le visuel.

Alors certes il y aura toujours cette gouaille et cette maîtrise de l'argot et de l'humour franchouillard pour égayer les conversations, mais le décalage viendra cette fois-ci davantage des effets visuels et autres figures de style. 

Personnages qui s'adressent régulièrement directement au spectateur, bruitages et accélération de l'image, situations cartoonesques, onomatopées affichées à l'écran... Mine de rien Audiard a tenté énormément de choses dans le film pour offrir quelque chose de différent. 

Malheureusement les bonnes intentions ne font pas tout. 

Ruptures du quatrième mur à la chaîne

Ruptures du quatrième mur à la chaîne

Dur dur le passage des âges

Probablement parce que des effets de ce genre ont été épuisés depuis longtemps, Faut pas prendre... m'a tout de même laissé de marbre dans beaucoup de ses situations. Non pas que je ne trouvais pas le tout foncièrement amusant, mais  il faut admettre que beaucoup de gags poussent trop loin la carte de l'absurde, à l'image de ce gorille assommé qui fera quelques pas avant de s'effondrer plus discrètement pour ne pas gêner l'assistance... Mouais. 

Enfin ce n'est pas pour cracher dans la soupe parce qu'on ne va pas se le cacher Marlène Jobert à cette époque avait un air à se damner ainsi qu'une sacrée chute de reins, mais le personnage transpire tellement le sexe qu'on en finit par le trouver vraiment grossier. 

Sachant qu'il y a quelques jours pour le décès de Bertrand Blier certains s'offusquaient du contenu des films du gaillard (Les Valseuses et Tenue de Soirée en tête) mieux vaut qu'ils ne découvrent jamais l'existence de ce film où le seul intérêt des dix premières minutes réside dans la capacité de la fine soie de Jobert à cacher sa poitrine. 

Bref pour du Audiard je dois avouer que je m'attendais à rire plus surtout avec une avalanche de noms tels que André Pousse, Paul Franckeur ou l'inévitable Robert Dalban parmi les seconds couteaux. 

Heureusement qu'il y a ces deux là

Mais il y a malgré tout deux personnages qui ressortent du film et qui l'empêchent d'être totalement raté/dépassé selon votre humeur. 

Soyons courtois et commençons par la dame j'ai nommée Françoise Rosay qui s'en donne à coeur joie avec ce personnage de tatie flingueuse qui donne un grand coup de torchon dans ce milieu de voyous indélicats. 

Entre les répliques et les mimiques de l'actrice, tante Léontine a tout pour rejoindre les personnages les plus cultes que le cinéma de cette époque a pu nous offrir !

Mais bien entendu comme d'habitude il y en a un qui change systématiquement la donne. 

Car même dans un film aussi moyen que celui-ci Bernard Blier n'a jamais été mauvais, et a toujours été inimitable et extraordinaire !

Même lors des séquences les plus ridicules l'implication du gaillard et sa capacité sans limites à camper des truands gauches et cupides suffira à sauver chaque séquence dans lesquelles Audiard a eu le bon goût de le faire apparaître. 

Allez hop les biftons la vieille !

Allez hop les biftons la vieille !

Le bruit voulait qu'Audiard était largement meilleur dialoguiste que metteur en scène... C'est pas faux. 

Mais c'est un peu dur également car bien que le curseur de l'absurde soit poussé beaucoup trop loin et que pas mal de gags manquent de rythme les idées étaient tout de même là pour une comédie qui avait tout pour devenir un classique du genre. 

Peut être que les moyens de l'époque étaient trop limités pour un tel projet, ou bien peut être que le mauvais goût était déjà de mise en 1968 et que le film n'a jamais été vraiment bon...

Au moins il a la bonne idée de ne pas traîner et les nombreuses apparitions de Blier et Rosay suffisent à suffisamment nous amuser pour qu'on s'accroche jusqu'au bout. 

Note : 2.5/5

Commenter cet article