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Ma dose de cinéma

Danse avec les Loups - L'âme des Amérindiens

Publié le 11 Juillet 2024 par Gaffeur in Western, Kevin Costner, Aventures

Il aura fallu 90 ans pour que les amérindiens soient à l'honneur

Il aura fallu 90 ans pour que les amérindiens soient à l'honneur

Ca y est c'est officiel, l'annonce que ceux qui ont vu et adoré Horizon Chapitre Un est tombée : Warner repousse la sortie du deuxième volet à une date indéterminée pour laisser plus de temps à la première de toucher plus de monde. 

Dans les faits il s'agit certes d'un aveu d'échec mais pour être honnête il s'agit de la meilleure stratégie pour le studio : avec à peine 30 millions récoltés en trois semaines pour un budget de pas loin de 100, sortir le second volet à peine deux mois plus tard équivaut à se faire seppuku.
En effet si on ne laisse pas le temps au premier opus d'être découvert en VOD ou DVD qui voudra aller voir le second hormis la poignée d'irréductibles qui se sont déplacés la première fois ? 

En vrai même si je suis un peu triste de voir la suite décalée je suis surtout dégoûté qu'un tel projet n'attire quasiment personne, surtout que les critiques négatives abordent la longueur du projet et sa quasi-absence de scènes d'action... 

Mais depuis quand Costner a-t-il fait des films d'action ? Open Range ? Certes la fusillade finale dure une dizaine de minutes mais en dehors de cette séquence il n'y a pas la moindre scène d'action pendant l'heure quarante qui précède. 

Et puis surtout il y a Danse avec les Loups

Version cinéma : environ 2h45.

Version DVD : 3h30.

Et dans les deux cas si je m'amusait à placer toutes les scènes d'action bout à bout on obtiendrait pas plus de 15 minutes. 

Alors pourquoi tout le monde adore ce film et pourquoi les détracteurs de Horizon critiquent un aspect déjà présent dans les précédents films de Costner ? 

La réponse est évidente : Danse avec les Loups ne ressemble à aucun autre western. 

Amérindiens et Colons au même niveau

Amérindiens et Colons au même niveau

A la recherche de John Dunbar

Au cour d'une bataille pendant la guerre de Sécession le lieutenant yankee John Dunbar est blessé à la cuisse et va devoir être amputé pour ne pas contracter d'infection.
Profitant de la pause des chirurgiens, Dunbar s'éclipse et vole un cheval afin de foncer sur les confédérés pour y trouver une mort de soldat. 
Contre toute attente son action donne un élan de motivation aux troupes de l'Union qui volent à son secours et chassent les sudistes. 
En guise de récompense on offre à Dunbar l'affectation de son choix. 
Il choisit de rejoindre un poste avancé jouxtant les terres indiennes car il a toujours voulu voir l'Ouest Sauvage avant qu'il ne s'éteigne. 
Une fois sur place le lieutenant se rend compte que le fort est désert, mais il décide d'attendre les renforts en ignorant que les deux personnes au courant de son affectation sont mortes. C'est alors qu'il réalise qu'il n'est pas seul dans la région. 

Danse avec les loups démarre comme un de ces gros projets que Hollywood affectionne tant à base de figurants par dizaines, de champs de bataille et de moments épiques, mais sa première audace est de très vite zapper tout ça pour se concentrer sur son personnage principal. 

De film de guerre le film se transforme ainsi en drame intime pour répondre à la question que se pose le héros : qui est John Dunbar ? 

Bien loin de la figure du soldat de cinéma le lieutenant interprété par Costner en personne n'est pas un assoiffé de batailles ni même un individu qui se cantonnera au règlement que l'armée lui aura inculqué. 

On découvre ainsi un officier paisible, à cheval sur la discipline mais dont l'émerveillement devant les vastes étendues de l'Ouest n'aura d'égal que le respect éprouvé pour les autochtones. 

Poésie et humanité

Long et contemplatif, Danse avec les Loups surprend par la capacité de son réalisateur à s'attarder sur des plans des pleines et des troupeaux de bisons tandis que la musique habille à la perfection chacune des situations et chaque état d'âme des personnages. 

Il y a spectacle et spectacle, et Costner en optant pour un film qui prend son temps de développer son propos et de creuser ses personnages offre un parcours psychologique extraordinaire entre le héros et ses voisins sioux, jusqu'à cette ultime réplique inoubliable qui crève le coeur où un ancien rival clamera son amitié pour son ancien ennemi. 

N'espérez ainsi pas un western où la poudre s'exprimerait pour un oui ou pour un non, Costner casse les codes en laissant la place au dialogue, aux rencontres pacifiques visant à établir une relation de confiance entre le soldat et les amérindiens et bon sang ce que cela fait plaisir de voir un film qui ose traiter les natifs comme une civilisation à part entière !

On y découvre ainsi les sioux, leurs traditions, leurs bons et leurs mauvais côtés. On découvre les indiens comme on ne les avait jusque là que trop rarement aperçus (Little Big Man) et honorés.

Tourné en grande partie en langue Lakhota le film rendit un tel hommage aux amérindiens que Costner fut nommé membre honoraire par le peuple sioux. 

Notez cependant que le film n'est pas non plus tout beau tout rose dans sa représentation des tribus indigènes : les sioux ont beaux être montrés comme les gentils de l'histoire en comparaison des violents pawnees, ces derniers lors de leur introduction expriment les mêmes ressentis que leurs rivaux vis à vis des blancs. Si il y en a un, d'autres viendront et ravageront leurs terres, et si les sioux optent pour une approche se limitant à voler les chevaux pour coincer les envahisseurs les pawnees ont simplement une façon plus extrême de traiter le problème. 

La version longue nuancera encore davantage les autochtones puisque la terrible scène de la découverte des bisons dépecés par Dunbar et ses voisins trouvera dans cette version une véritable conséquence lorsque les responsables du carnage seront retrouvés et que les sioux dévoileront un visage plus sombre en mettant à mort brutalement les braconniers. 

Cette version ajoutera également une séquence touchante et importante qui là aussi montrera les sioux sous une face moins lisse puisqu'il s'agira du sort de la précédente garnison du fort. Leurs chevaux dérobés les soldats n'ont eu d'autre choix que de mourir de faim ou de déserter. 

Oui vous l'avez compris si vous n'avez vu que la version cinéma la version longue est tout simplement incontournable car elle fait partie de ces rares director's cut dont tous les ajouts sont pertinents et ne font qu'enrichir davantage une oeuvre qu'on pensait déjà parfaite en l'état. 

Même les terribles Pawnees sont nuancés

Même les terribles Pawnees sont nuancés

Allons, ça bouge tout de même un peu 

Chaussettes l'adorable loup va-t-il finir par accepter de venir manger dans la main de Dunbar ? Les bisons vont-ils enfin se montrer ? Pourquoi y a-t-il une blanche parmi les sioux ? Comment passer l'hiver ? L'Armée de l'Union va-t-elle se rappeler qu'elle a envoyé un homme au bout du territoire ? Les redoutables pawnees vont-il revenir ? 

On se pose beaucoup de questions au cours du visionnage et le film a le bon goût de répondre à chacune d'entre elles, rendant le scénario parfaitement cohérent et quasiment sans failles quitte à se montrer très cruels par moments. 

Parce que inconsciemment malgré l'évolution du personnage et l'amélioration constante de ses rapports avec ses voisins on se doute bien que la fête ne va pas durer éternellement et que tôt ou tard les obligations et l'ancienne vie de Dunbar vont s'emparer de Danse avec les loups. 

Ainsi en dépit de sa poésie le film contient malgré tout quelques pics de violence mis en scène avec brio qu'il s'agisse de l'exécution de Timmons ou encore d'un raid pawnee qui tournera à la bataille rangée remplie de plans iconiques. Impossible en effet d'oublier la dernière image de Wes Studi !

Contrairement à ce que l'on pourrait penser le film bouge tout de même plutôt bien et n'oublie pas de proposer du spectacle tout en conservant son approche poétique : aviez vous ainsi déjà remarqué que lors de la bataille d'ouverture la mort n'est filmée qu'une seule fois ?  Cela n'empêche nullement la séquence d'être épique avec des images fantastiques de la charge de l'état-major yankee ou lorsque le clairon retenti quand passent les prisonniers. 

Tatanka ?

Tatanka ?

Vraiment quand on y repense, pourquoi Horizon se plante alors que Danse avec les Loups du même auteur est une oeuvre si culte et parfaite qu'il me semblait évident que le nom de Kevin Costner associé à une fresque sur le Far West serait forcément synonyme de succès ? 

Non parce que quand j'entend que la nouvelle fresque manque d'action et est trop longue alors qu'il y a plus d'action et autant de métrage que pour Danse avec les loups il y a quelque chose qui m'échappe...

Peut être que le western est un genre devenu tellement télévisuel qu'il semble saugrenu pour le public de se déplacer au cinéma pour quelque chose qu'il peut déjà voir décliné en dix ou douze séries ? 

Ou bien peut être que tout simplement Kevin Costner est à présent trop âgé pour parler aux plus jeunes générations ? 

Quoiqu'il en soi il faudra attendre quelques mois supplémentaire pour évaluer plus objectivement la qualité de Horizon

Par contre cette redécouverte de Danse avec les Loups pour la dixième fois sans pouvoir stopper le film en cours en dépit de ses presque quatre heures et avec la même émotion en fin de visionnage ne fait que renforcer l'aspect monumental d'une oeuvre unique en son genre qui n'a d'ailleurs pas été tellement copiée que ça. 

Certes les nouveaux westerns et westerns-modernes abordent plus régulièrement la question du traitement des amérindiens, mais aucun ne va se plonger complètement dans le sujet, parce que qui voudrait livrer un film qu'on accusera de singer le chef d'oeuvre de Kevin Costner ? 

Note : 5/5

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