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Ma dose de cinéma

Misanthrope - On frôle la pépite du polar !

Publié le 22 Mai 2024 par Gaffeur in Thriller, Shailene Woodley, Ben Mendelsohn

Le polar de 2023 ? On va voir ça !

Le polar de 2023 ? On va voir ça !

Il y a quasiment un an jour pour jour débarquait dans nos salles Misanthrope, le nouveau film du réalisateur argentin Damian Szifron qui s'était fait connaître avec notamment Les Nouveaux Sauvages une comédie dramatique qui avait fait parler lors de sa sortie en 2014. 

Accompagné d'une multitude de critiques presses très généreuses à propos de sa qualité ainsi que de premiers retours spectateurs largement positifs on s'attendait à ce que le film ne connaisse un petit succès auprès des amateurs de polars poisseux. 

Mais comme les gens ont ces dernières années compris que l'avis de la presse mieux vaut s'en faire un suppositoire ("et encore pour enfants" pour citer Audiard) le film n'a pas réussi à percer et a été rapidement déprogrammé en dépit des comparaisons flatteuses qui le plaçaient dans les mêmes eaux que Zodiac ou Se7en, rien que ça !

Après tout il peut arriver que ce genre de comparaison se vérifie, j'ai encore en mémoire la claque que m'a collé le Honk Kongais Limbo alors pourquoi Misanthrope ne pourrait-il pas en faire autant ? 

Quelques scènes qui font froid dans le dos

Quelques scènes qui font froid dans le dos

Un film très actuel...

Le soir de la St Sylvestre à Baltimore les feux d'artifices commencent à retentir pour célébrer la nouvelle année. Mais à chaque explosion de fusée, un tireur fou abat froidement une personne au hasard. 
A plusieurs rues du quartier uppé où a lieu la tuerie, la patrouilleuse Eleanor est appelée en renfort sur la scène de crime. 
Le lendemain le dossier arrive entre les mains d'un agent du FBI qui ne manque pas de noter le comportement d'Eleanor ainsi que ses réflexions qui pourraient s'avérer utiles pour trouver le tueur. 

S'ouvrant ainsi avec une séquence longue et froide où des innocents sont tués aléatoirement par un sniper, Misanthrope happe le public avec un sujet hélas très récurrent de notre triste époque, notamment chez l'Oncle Sam : les tueries de masses. 

Mais contrairement à ce qu'il se passe dans 95% des cas cette fois-ci le tueur ne s'est pas suicidé ou ne s'est pas fait tuer. Rapidement notre fliquette avec ses déductions instaure la crainte dans la tête du spectateur : s'il est toujours en fuite, non seulement il est très malin mais en plus rien ne l'empêchera de recommencer. 

Cette capacité qu'a le scénario a distiller une tension constante sera l'une de ses plus grandes forces et malgré quelques baisses de rythme il y aura toujours un moment fort pour faire remonter l'intérêt et le suspense : les corps à la morgue, les bavures entre services et bien entendu les quelques actions du tueur qui seront à chaque fois glaçantes.  

... peut être un peu trop

Malheureusement très vite le réalisateur tombe dans le piège du politiquement correct et va parasiter son film avec une surdose de woke et de messages plutôt déplacés qui rendent le film assez limite par moments. 

En vrai je m'en cogne complètement qu'un personnage soit homosexuel, mais je n'en peux plus de voir des séries et films faire comme si tous les homos appuyaient constamment sur leur orientation sexuelle... 

Et comme si des échanges du genre "vous êtes marié ?" "Oui, depuis qu'on me l'a autorisé" ne suffisaient pas à glisser maladroitement un message dans un film qui n'en avait pas besoin, les motivations du tueur que je ne révèlerai pas permettront de placer un autre sujet que la frange offensée du monde adore : le veganisme et la place de l'élevage dans notre société. 

Mais là encore en soi je n'ai rien contre le procédé mais lors des révélations les choses sont tournées de telle sorte qu'on a presque l'impression que le cinéaste pardonne voir approuve l'assassin... 

Bref cette couche de messages contemporains au milieu d'une enquête qui pourtant n'est pas désagréable à suivre est d'autant plus regrettable qu'en soi, bah j'ai plutôt aimé suivre la traque !

 

Mine de rien le film remue pas mal

Mine de rien le film remue pas mal

Un mélange indé/action qui fonctionne

L'affiche promettait une histoire de flics dark et riche en action, et au final Damian Szifron parvient au juste équilibre entre phases d'investigations, développement des personnages et moments plus nerveux où sa réalisation saura donner un certain cachet aux scènes d'action. 

C'est que mine de rien les balles vont régulièrement siffler : avec un assassin tireur d'élite dans la nature les forces de police ne vont pas lésiner sur les moyens et il faudra faire avec plusieurs séquences d'intervention ainsi qu'un rapide mais brutal échange de tirs dans une supérette ! 

Mais contrairement à la concurrence américaine Szifron fait le choix de ne pas faire dans le glamour ou dans le visuel chiadé. Ses images sont brutes et le résultat est doublement positif : d'une part on ne pourra pas dire qu'il singe l'imagerie de Se7en et de l'autre la violence semble plus réaliste et dégueulasse lorsqu'elle est filmée de manière sobre. 

Ne vous fiez donc pas à ce visuel qui semble presque fauché : les idées de mise en scène seront là et le scénario ne fera pas dans la dentelle !

On pense notamment au deuxième attentat commis par l'assassin où l'héroïne découvrira les corps en même temps que le spectateur en train de se demander "attends comment le mec a pu coucher une équipe de flics tout seul ?". On s'attendait à du hors champ complet mais entre quelques inserts explicites de civils mitraillés le tout sera montré via les caméras de surveillance, une façon habile de ne pas montrer le visage du tueur trop rapidement. 

Un casting qui porte le film

Et puisque je parle de l'héroïne je dois avouer que j'ai été assez surpris par le choix de Shaylene Woodley qui au départ me rebutait un peu : une nana qui a fait ses armes dans une franchise pour préados ? Dans un polar à la Fincher ?

Et bien croyez le ou non mais j'ai été convaincu par le jeu de Woodley qui là encore ose un rôle sans maquillage, sans glamour ou la moindre note sexy. 
C'est justement ce qui fait qu'on s'attache immédiatement au personnage qui semble plus que dans tout autre thriller être une flic banale, évitant ainsi le piège du rôle de composition façon Destroyer avec une Nicole Kidman qui en faisait des caisses en matière d'image. 

Je peux dire la même chose sur Ben Mendelsohn qui incarne à merveille un vétéran du FBI rodé aux combines politiques et aux guéguerres entre services. L'acteur parvient à rester sur cet angle du carriériste endurci sans jamais se laisser tenter par un léger surjeu pour faire de son personnage un flic de cinéma bien badass. 

Lammark et Eleanor sont ainsi des personnages simples et dénotent de ces flics hollywoodiens cools et intrépides. Même Brad Pitt et Morgan Freeman avaient leur côté stylé et charismatiques chez Fincher ce qui ne sera pas le cas ici. 

En tout cas le choix de l'héroïne a payé

En tout cas le choix de l'héroïne a payé

Franchement si je n'ai pas détesté Misanthrope, j'avoue que j'en veux pas mal à son réalisateur d'avoir à ce point raté une belle occasion de faire un très grand polar ! 

Ca commençait pourtant très bien et le casting est d'une sobriété inattendue, mais il a fallu que le scénario se perde avec des sous thématiques trop nombreuses voir envahissantes.

Sans parler de la louche de woke je pense par exemple à ces nombreuses scènes où nos héros se heurtent au système politique et à la hiérarchie policière. L'idée est bonne, mais dans les faits cela ne sert pas vraiment l'intrigue puisque malgré les bâtons dans les roues le duo arrivera toujours à facilement poursuivre l'enquête. 

Clairement le film est un bon polar, efficace avec plusieurs moments mémorables... Mais il frustre aussi beaucoup car on passe si près de la pépite qu'on peut presque sentir l'odeur de l'or sans jamais le voir briller. 

Note : 3/5

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