Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Ma dose de cinéma

Second Tour - Dupontel au vitriol

Publié le 13 Mars 2024 par Gaffeur in Comédie, Drame,, Albert Dupontel, Cécile de France, Nicolas Marié

Trois, deux, un... PTOUM !!!

Trois, deux, un... PTOUM !!!

Lorsque Albert Dupontel sort un film, c'est toujours un évènement pour les inconditionnels du plus trash des auteurs des années 90-2000.
Mais alors que le réalisateur semblait sur une pente plus qu'ascendante depuis trois films, son dernier bébé n'a pas forcément bien marché lors de sa sortie il y a quatre mois. Très peu de promo et retiré trop vite des cinémas de ma zone, j'avais raté Second Tour en me demandant pourquoi malgré des critiques spectateurs aussi bonnes que ses films précédents celui-ci était boudé ? 

Sans oublier également nos chers Césars dont les seules vraies preuves de goût consistaient aux récompenses attribuées aux trois derniers films de Dupontel. De Neuf Mois Ferme à Au Revoir là Haut sans oublier la rafle de Adieu les cons le réalisateur semblait être devenu le chouchou de cette cérémonie qu'il n'affectionne pourtant pas des masses.

Et puis je me suis dis qu'avec un sujet pareil Dupontel allait taper certes sur la classe politique mais également sur les médias et que ce ne serait peut être une oeuvre trop dérangeante pour qu'on la récompense ou qu'on lui accorde une promo digne de ce nom. 

Toute ressemblance...

Toute ressemblance...

A première vue, c'est classique

Tandis que la campagne présidentielle bat son plein et se déroule dans le plus grand calme, le candidat pressenti pour être le prochain président Pierre-Henry Mercier est victime d'un attentat. 
S'en sortant miraculeusement avec quelques éraflures, Mercier continue sa campagne au grand dam de Mademoiselle Pove.
Journaliste cantonnée à la rubrique foot avec son caméraman et monteur Gus, Pove ne peut pas encadrer Mercier et entreprend d'enquêter sur lui pour prouver à la France entière qu'il n'est pas le brave candidat vendu. 

Dupontel a toujours aimé rentrer dans le lard de la société : Bernie était quelque part un drame sur les classes, Le Créateur se moquait des auteurs tandis que la police en prenait pour son grade dans Enfermés Dehors
Pourtant avec Au Revoir là Haut puis Adieu les Cons le réalisateur s'il n'avait rien perdu de sa volonté de tourner en ridicule les pseudo-élites, la mondialisation ou la technologie on se trouvait en présence de films plus sages que les deux premiers tiers de sa filmographie (pas de globophage ou de pelles aiguisées sur les gouttières de l'autoroute).

Second Tour se place dans la logique des dernières oeuvres de Dupontel avec ce même ton très sérieux pour ses premières minutes avant d'introduire un duo de personnages loufoques et de le confronter à ce système que l'auteur déteste tant. 

Rien de neuf sous le soleil à première vue, mais rien de rebutant non plus car encore une fois Dupontel s'adresse aux meilleurs vétérans disponibles ! 

On prend (presque) les mêmes

A la limite je pourrai regretter l'absence de Michel Vuillermoz qui vole chaque séquence de chaque film de Dupontel auquel il a participé (inoubliable dans Le Créateur avec ses ruptures du 4ème mur qui n'ont rien à envier à Deadpool), mais encore une fois Dupontel a parfaitement casté ses personnages.

Après Catherine Frot, Sandrine Kiberlain et Virginie Efira c'est à Cécile de France de se frotter à l'univers acide du Vilain
Et c'est là que l'on se rend compte que le film a très clairement été boycotté par les votants car ne pas avoir nommée l'actrice pour un prix est une véritable honte tant on ne l'avait pas vue aussi géniale depuis longtemps. 

On se délectera également parmi les seconds couteaux de la présence des inévitables Bouli Lanners, Philippe Duquesne et autres Philippe Ulchan qui malgré des rôles plus que restreints seront tous plus savoureux les uns que les autres. Ce n'est certes pas très glorieux pour Duquesne dont le visage est en partie masqué pour ses deux apparitions mais le gars est si bon que la voix et les mimiques suffiront à amuser. 

Mais j'ai bien entendu gardé le plus redoutable pour la fin en la personne de Nicolas Marié. Présent dans toutes les oeuvres de Dupontel (sauf Au Revoir là Haut curieusement), le comédien est une nouvelle fois mémorable dans la peau de Gus le caméraman ultra-fan de football qui se servira régulièrement de sa passion pour débloquer les situations avec plus ou moins de génie. 
Bref depuis sa plaidoierie bègue dans Neuf Mois Ferme j'ai découvert l'un des comédiens contemporains les plus drôles et celui-ci n'a pas démérité cette fois encore !

Nicolas Marié, qu'on fasse entrer ce mec au panthéon des types les plus drôles par pitié !

Nicolas Marié, qu'on fasse entrer ce mec au panthéon des types les plus drôles par pitié !

Une histoire inattendue

On parcourt ainsi le premier acte du film en riant bien volontiers aux facéties de Gus et au caractère bien trempé de Cécile de France lorsqu'on se surprend à faire un constat : Dupontel ne joue pas un rôle comique.
C'est là une grande première dans sa filmographie non seulement il ne joue pas forcément le rôle principal mais en prime le personnage n'est pas amusant ! Remarquez, c'est un politicien et ces gens là ne sont en général amusants que malgré eux...

Mais cette surprise sera suivie de bien d'autres car malgré son départ qui nous donne la fausse impression que Dupontel ne quitte pas sa zone de confort (on retrouve ses gimmicks habituels comme les flashbacks accélérés) le scénario va aller très loin.

On comprend alors pourquoi certains torchons ont qualifié le film de complotiste (si, si, je ne souhaite pas citer ce ramassis de bêtises mais vous pouvez vérifier) car la comédie sera petit à petit grignotée par un drame social et politique au ton étonnamment sérieux.

Attentat, tentatives de meurtres, élites qui conspirent... Dupontel qui pourtant a ri et nous à fait rire de tant de choses pourrait-il lui même avoir du mal à trouver la politique drôle au point de basculer dans le drame ? 

Entre naïveté et désespoir 

Mais même si on rigole toujours franchement aux répliques bien senties que nous sert Dupontel, ce ton plus sérieux hérité du personnage de Suze de Adieu les cons séduit et l'histoire se suit avec un véritable intérêt quand on comprend que les choses vont probablement mal tourner. 

Et si j'applaudis sincèrement la démarche du réalisateur qui a le cran d'aborder aussi frontalement certains aspects de la politique et d'aller très loin dans le pastiche (le caméo de David Marsais a du faire grincer quelques dents) il faut tout de même que la fin me laisse un goût mitigé. 

Je ne vais pas en dire trop mais alors qu'on s'attendait à un final dans le ton de Bernie ou Adieu les cons qui voyaient le système l'emporter sur les personnages Dupontel préfère opter pour une sorte d'entre-deux.

En soi la fin est bien écrite mais j'ai été assez surpris de découvrir une note assez naïve de la part d'un auteur pourtant très lucide sur l'état de notre société et l'impasse dans laquelle elle se trouve. A moins qu'il ne s'agisse d'espoir ? 

Dupontel et les blondes, une grande histoire

Dupontel et les blondes, une grande histoire

Si vous cherchez une comédie dégueulasse façon Bernie ou Enfermés dehors, voir même simplement une comédie pure à la Neuf Mois Ferme vous risquez d'être déçus. Vous espérez un film qui mêle le drame et la comédie aussi bien que Adieu les Cons ? Alors là vous pourriez avoir trouvé à qui parler.

Faisant partie de ces rares films à charger pour de bon le monde politique actuel en faisant autre chose que des blagounettes pas trop piquantes, Second Tour est la comédie dramatique la plus réussie du répertoire de Dupontel. 

Certes ce n'est pas pour autant sa meilleure oeuvre mais on sent à travers la mise en scène et l'écriture un Dupontel tellement appliqué qu'on ne peut qu'adhérer au concept. 

Par ailleurs si vous n'étiez pas un admirateur du réalisateur sachez que ce film est peut être le plus accessible de sa filmographie et que même les sceptiques peuvent l'apprécier. 

Note : 3.5/5

Commenter cet article