Je ne vais pas tenter de prétendre le contraire : bien qu'il m'arrive de découvrir des films sur le thème de l'amour et d'en apprécier certains (ah... Eternal Sunshine...) ce n'est pas vraiment le genre qui me fait me ruer dans les salles ou dans les rayons de la fnac pour me procurer un DVD.
Alors pourquoi vous parler de Love Actually aujourd'hui ?
Non parce que j'aurai pu vous parler de Quatre Mariages et un Enterrement ou encore de Love et Autres Drogues qui sont certes des films romantiques mais qui sont d'excellentes comédies sans trop d'eau de rose, alors pourquoi un film dont le titre promet une montagne de guimauve avec des fraises en supplément ?
Et bien tout simplement parce qu'à Noël dernier le film fêtait ses vingt ans (inutile de me remercier pour le coup de vieux, c'est normal) et qu'un journal ouvertement dans le vent titrait son torchon article du jour en affirmant qu'on ne pourrait plus refaire Love Actually aujourd'hui, et que ce n'était pas plus mal.
Et c'est con mais quand je vois qu'un film dérange à ce point un mouvement aussi excité par la censure et la relecture que le wokisme je me dis que j'ai tout intérêt à le découvrir avant qu'un obscur bien-pensant trop haut placé ne décide d'interdire la diffusion de l'oeuvre en question.
Du coup, que peut donc cacher d'aussi infââââme un film baptisé Love Actually ? Et surtout la vraie question, est-ce un bon film malgré ses vingt ans ?
Film à sketches
La première chose qui frappe lorsqu'on lance le film pour la première fois, c'est la durée du générique d'ouverture et la floppée de noms qui défilent sous nos yeux.
C'est bien simple je crois bien qu'aucun comédien ou comédienne britannique en vogue à cette époque ne se soit pas trouvé au casting.
Résultat avec une vingtaine de personnages principaux dans le scénario, on imagine mal comment Richard Curtis aurait pu orchestrer une comédie à la construction classique avec une traditionnelle histoire d'amour impossible ou en perte de vitesse.
Love Actually est ainsi presque un film à sketches dans le sens où chaque personnage va croiser la route des autres à un moment ou à un autre jusqu'à un final poignant dans un terminal d'aéroport.
Une dizaine d'histoires principales vont ainsi se jouer devant nous et aborder toujours avec humour mais parfois avec drame la question des relations amoureuses.
Un ton qui fait du bien
Ainsi en dépit de son titre qui annonçait une avalanche de séquences mielleuses, Love Actually est bel et bien une comédie sur le thème de l'amour.
Il suffit de voir la première séquence qui nous permet de découvrir un Bill Nighy déjanté comme on ne l'aurait jamais soupçonné pour comprendre que le but du film n'est pas de faire pleurer mais d'amuser le public.
Et bon sang ce que cela fait plaisir de découvrir une vraie comédie à l'anglaise truffée de situations loufoques et de dialogues bien sentis qui permettent de redécouvrir certains comédiens.
Même si pour ma part je trouve Hugh Grant au dessus de tous les autres (il faut dire que son rôle de Premier Ministre le rend encore plus décalé que la moyenne) je dois avouer que j'ai été agréablement surpris devant Liam Neeson dont quinze années de films d'action m'avaient empêché de l'imaginer aussi drôle et touchant.
Car bien que le film soit très drôle il n'est pas non plus une pépite d'eau de rose et Curtis ne passe pas sous silence le fait que les histoires d'amour peuvent mal tourner ou tout simplement ne jamais arriver.
Mais c'est justement parce que nous avons tous croisé quelqu'un qui ne pourrait jamais partager notre vie ou appris que notre moitié en pinçait pour quelqu'un d'autre que ces séquences fonctionnent bien malgré leur ton plus triste.
Du coup, quel est le problème ?
Franchement en visionnant le film je n'arrivais pas à comprendre pourquoi certains le trouvent aujourd'hui dérangeant et offensant.
Et puis j'ai réalisé qu'effectivement le réalisateur avait tourné le film qu'il voulait, écrit comme il le voulait sans se soucier de ce que pensait les ulcérés chroniques de twitter (c'est qu'à cette époque bénie les réseaux sociaux n'existaient pas).
Résultat on reproche aujourd'hui au film qu'il n'y ait aucun couple LGBT et très peu d'acteurs issus de minorités...
Et alors ? Loin de moi l'idée farfelue de vouloir prétendre qu'il n'y avait aucune personne issue de ces milieu à cette époque mais on osait moins affirmer son orientation à ce moment là...
Du coup à l'époque pourquoi se serait-on senti obligé d'écrire en cochant des cases comme les 3/4 des productions d'aujourd'hui ?
Un film ou une oeuvre reflète son époque, et que cela plaise ou non aux wokes il y a vingt ans la société était différente, et on ne va pas effacer ou retourner des films juste pour leur faire plaisir.
Andrew Lincoln, le stalker bouuuuuh !!
Et le second point qui fait grincer des dents aujourd'hui concerne Mark le personnage interprété par Andrew Lincoln (oui quand je vous disais qu'il y avait tout le monde dans ce film je n'exagérais pas).
Pour la faire courte le gaillard est le témoin de mariage de son meilleur ami. Après la cérémonie la mariée lui demande ses images de la fête car les siennes sont ratées.
Elle découvre qu'elle est présente sur tous les plans tournés par Mark et comprend que derrière la froideur de l'ami de son mari se cache un amour impossible.
Le soir de Noël Mark dévoile ses sentiments à Juliet en faisant défiler des panneaux sur lesquels sont inscrits des blagues et des mots définissant son amour pour la jeune femme.
Et pour ça, on parle aujourd'hui de stalker ou de masculinité toxique.
Prenons un exemple : Joe de You est un vrai stalker manipulateur, pervers et assassin de surcroît. Là on pourrait polémiquer sur un tel personnage.
Mais Mark n'est qu'un homme amoureux qui a gardé pour lui ses sentiments et qui n'a pas une seule fois tenté de manipuler la jeune femme. D'ailleurs le spectateur découvre en même temps qu'elle l'étendue de ses sentiments ainsi que la détresse du jeune homme lorsque son secret est dévoilé et que cela ne rend pas cet amour possible pour autant.
Le soir de Noël le personnage décide de dire les choses une bonne fois pour toutes, ne fait aucun geste malsain et n'a nullement une attitude menaçante. C'est au contraire Juliet qui décide de le poursuivre pour lui accorder un unique et rapide baiser.
Où est la masculinité toxique là dedans ?
A la rigueur on peut se dire que le fait que le trio continue de se fréquenter par la suite comme si de rien soit assez glauque et cruel, mais de là à parler de masculinité toxique et de stalker j'ai envie de vous dire une nouvelle fois regardez You et comparez les copains !
Ce qui me gonfle le plus dans toute cette énième polémique à la gomme c'est que malheureusement le réalisateur s'est apparemment excusé au point de dire qu'aujourd'hui il ne referait pas le film de la même façon.
Et c'est bien dommage !
Parce que quand quelqu'un comme moi qui n'aime pas vraiment découvrir des films d'amour en vient à penser que le film était excellent, c'est que le film était fondamentalement réussi !
Triste époque donc où le mec qui a réalisé la comédie romantique anglaise ultime se sent obligé de dire qu'en fait son film n'était pas si bon.
Bref si vous n'avez jamais vu le film : découvrez le vite.
Et si vous l'avez déjà vu et adoré : revoyez le encore une fois !
Parce qu'en toute bonne foi il se dégage du film une telle bonne humeur que par les temps si obscurs que nous traversons vous auriez tort de l'ignorer parce qu'une bande de gourous de la bien-pensance vous suggère de le faire.
Note : 4/5