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Ma dose de cinéma

Gaston Lagaffe - Et si ce n'était pas si nul ?

Publié le 23 Novembre 2023 par Gaffeur in Comédie

Franchement, l'affiche a beau manquer de folie les personnages sont bien castés

Franchement, l'affiche a beau manquer de folie les personnages sont bien castés

Tandis que depuis hier le tome 22 de Gaston Lagaffe est disponible dans toutes les librairies du pays, j'ai pu à nouveau constater un élément aussi triste que surprenant : la fanbase du héros créé par Franquin peut être aussi ouverte d'esprit et toxique que la pire frange de fans de Star Wars !

Et tandis que je me navrais de voir des gens vomir sur la nouvelle BD signée Delaf en hurlant qu'on ne reconnaissait pas les personnages et que Franquin devait se retourner dans sa tombe devant pareille trahison, je me suis soudain rappelé qu'il existait une adaptation cinéma des aventures du gaffeur le plus célèbre de l'histoire de la bande-dessinée, qui avait déjà subit un sacré bashing lors de sa sortie.

C'est en effet en 2018 que Pierre-François Martin-Laval nous a proposé la première version officielle en live action de l'un de mes personnages de chevet, et le moins que l'on puisse dire c'est que le gaillard doit encore s'en mordre les doigts ! 

Car si ses adaptations des Profs ont été de beaux succès commerciaux (plusieurs millions d'entrées à chaque fois), le réalisateur s'est attaqué à un personnage bien trop culte et qui plus est réputé inadaptable. 

Car si on peut concevoir sans soucis qu'une année scolaire dans un lycée pourrie puisse être une bonne base pour créer l'histoire d'un long-métrage, on ne peut pas vraiment en lisant Gaston Lagaffe imaginer un quelconque fil rouge : au maximum les histoires de Franquin s'étalaient sur deux planches, une demi-douzaine pour traiter d'un gag récurrent à la rigueur !

Résultat le public n'a pas voulu y croire et l'a fait savoir à Pef : moins de 600 000 entrées au total et des notes catastrophiques accompagnées des sempiternels "on ne touche pas à Gaston" et autres "ils ont tué Franquin une deuxième fois". 

Et pourtant objectivement en tant qu'amoureux du personnage, Gaston Lagaffe par Pef n'est pas si affligeant que cela. 

Ouais par contre Longtarin est loupé je ne peux pas le nier

Ouais par contre Longtarin est loupé je ne peux pas le nier

D'accord, ce n'est pas brillant

Bon histoire de calmer ceux d'entre vous qui auraient eu envie de me pendre à un arbre avec une pancarte "traître" je vais tout de même calmer les choses tout de suite : non Gaston Lagaffe n'est pas un très bon film et encore moins un bon film. 

Et pour cause malgré les efforts déployés par Pef pour reproduire certaines des meilleures inventions ainsi que les pires gaffes de Gaston, le timing ne fonctionne pas pendant la majorité des séquences. 

Prenons un exemple visible dans l'une des bandes-annonces du film : un employé du Petitcoin (ce nom promis j'en parle juste après) s'apprête à se servir un café via les tuyaux à la con inventés par Gaston. Il tourne à peine le robinet qu'il hurle à la mort au moment pile où jaillit le café... Et on sent que le comédien s'attend à ce qui va lui arriver, résultat le manque de spontanéité fait qu'on sent venir le gag de très loin et le rire ne viendra pas. 

En vrai je pense que Pef aurait peut être dû faire des farces à ses comédiens et ne pas les briefer sur chaque séquence pour tenter de capter des réactions qui auraient été bien plus drôles. 

Mais le pire concerne les ajouts du film qui ne se déroule pas pendant les années 60-70 comme la BD mais de nos jours au sein d'une start-up baptisée Petitcoin (voilà voilà, quel humour) qui rend utile les objets inutiles... Et si l'idée de moderniser n'est pas bête (et évite aussi de raquer pour une reconstitution d'époque) le but de la start-up est tout simplement incohérent avec Gaston Lagaffe ! 

Je veux dire, si Gaston est drôle c'est parce qu'il apporte des inventions toutes plus tartes et inutiles (quoique j'ai toujours pensé que la déprimante aurait vraiment une place de choix à l'heure où on nous parle d'écologie et de recyclage) dans un environnement de travail très sérieux, et c'est ce décalage qui va créer le rire dans les albums. Mais quand de base la société est foutraque, pourquoi voir Gaston installé dans un transat ferait rire ?

Bref une comédie qui ne fait presque pas rire c'est déjà problématique en soi, mais quand en plus celle-ci adapte le héros l'un des héros les plus poilants qui soient (et je pèse mes mots, à chaque fois que je relis un album je me fend la pipe) on peut comprendre que certains aient crié au scandale.

Un casting rarement efficace

Enfin concernant le casting, il y a à boire et à manger.
D'un côté Théo Fernandez et Alison Wheeler sont à mes yeux tout simplement fantastiquement bien choisis, mais de l'autre les autres sans être foncièrement mal castés ne dégagent pas l'énergie nécessaire. 

Exemple : Jérôme Commandeur qui joue Monsieur de Mesmaeker. 
D'un côté il passe plutôt bien et l'idée de lui coller en permanence Madame Kiglouss est bonne (surtout que l'actrice a bien la tête de l'emploi) mais de l'autre... Depuis quand de Mesmaeker est-il souriant, calme et courtois ? 

Prenez n'importe quelle apparition du businessman dans les pages de Franquin et vous verrez : sourcils froncés, démarche pressée et traitant les membres de la rédaction Spirou de timbrés, foutriquets ou d'autres *$"%... De Mesmaeker perd d'avance à chaque fois de par son attitude négative et c'est justement ce qui en fait la meilleure victime de Lagaffe : les 3/4 du temps il pourrait signer ses contrats en étant simplement plus posé. 

Mais là à aucun moment il ne pète vraiment un câble et semble constamment sur la retenue ! 

Autre exemple : Arnaud Ducret en Longtarin... Idem, depuis quand notre cher flic accro aux sucettes à sous est-il un béta ? Carré, rigide et sans humour certes, mais pas un idiot !

Et c'est malheureusement comme ça avec 85% des personnages... 

Y'a pas à dire Labévue est énorme pour le coup !

Y'a pas à dire Labévue est énorme pour le coup !

Quelques idées bienvenues

Alors me direz vous, pourquoi ne pas avoir participé moi aussi à la crucifixion de Pef il y a presque six ans ? 
Et bien d'une part parce que je n'ai jamais trop aimé les travaux manuels et puis surtout, aussi raté qu'il puisse être sur bien des aspects, le film a malgré tout quelques bonnes trouvailles. 

Pour commencer le scénario malgré le déplacement temporel apporte une vraie bonne piste : pourquoi personne n'a jamais viré Gaston ? 
Aussi improbable que cela puisse paraître Pef a réussi à tirer de quoi faire un fil rouge à partir d'une série qui n'en avait pas, et le pire c'est que l'explication tient la route et fonctionne plutôt bien en matière de quiproquos. 

Autre bonne idée : le décor. Certes il semble froid et insipide au départ, mais l'open space va tout de même permettre quelques gags visuels sympa tandis que les bureaux installées dans des cases aux murs de verre évoqueront un strip de bandes-dessinées. 

Et surtout bien que beaucoup de personnages soient loupés, il y en a tout de même quelques uns qui valent leur pesant de cacahuètes, à commencer par Bertrand Labévue qui malgré un look n'ayant rien à voir avec le vrai est l'un des seuls personnages secondaires qui m'a vraiment fait sourire à chaque apparition. 

Quand à Gaston et bien si justement je n'ai jamais craché sur le film, c'est justement parce que Théo Fernandez est parfait dans le rôle et que le personnage est tel qu'on l'a connu dans la BD : attachant, maladroit, inventeur au génie discutable... Certes il est loin d'être aussi hilarant que son homologue dessiné, mais l'acteur y croit et ça finit par fonctionner. 

Infidèle, vraiment ?

Enfin je vais terminer exceptionnellement par un petit listing.

En effet la principale critique adressée au film à l'époque était que le film n'avait plus rien à voir avec la BD. 

Alors oui, l'époque n'est plus la même et il n'est pas question d'un journal hebdomadaire parasité par l'un de ses collaborateurs. 

Mais tout de même, rien à voir ? 

Le chat, la mouette, le hamac, le gaffophone, la voiture jaune et noire, longtarin et ses PV, de Mesmaeker et ses contrats, la bouée canard du p'tit cousin, la vache dans les bureaux, le patron dont on n'entend que la voix au téléphone, Smith en face, le gang des gaffeurs au complet, l'inondation pour sauver Bubulle, la boule de bowling en haut de l'armoire, le ballon publicitaire rouge, le cactus, le monorail... 

Certes il y aura beaucoup de références uniquement placées là pour le clin d'oeil, mais dire que le film n'est qu'une trahison est un peu facile et surtout injuste car je pourrais continuer à énumérer les références pendant un bon moment.

Et bien que le tout ne soit que trop rarement foncièrement amusant, j'avoue avoir aimé découvrir tout au long du film les meilleurs gadgets et accessoires de Gaston en live action. 

 

Franchement, difficile de faire meilleur cast pour ces deux là

Franchement, difficile de faire meilleur cast pour ces deux là

Il est vrai qu'adapter Gaston Lagaffe en film live action était une idée risquée, et le moins que l'on puisse dire c'est que si le film de Pef a une utilité c'est de confirmer que Gaston n'est pas fait pour le live. 

Le film est raté sur bien des aspects mais malgré ce sentiment de gâchis qui règne pendant beaucoup de séquences on en sort en se disant qu'on pourrait difficilement mieux adapter Franquin sous ce format.

A la limite en film d'animation 2D, il pourrait y avoir de quoi faire, mais quand je repense au fiasco de la série animée ... Non, clairement Gaston ne devrait pas s'aventurer hors des pages des albums. 

Pef a essayé, Pef a échoué. Mais on sent l'affection que le gaillard porte au personnage pendant tout le film, ce qui le rend tout de même un minimum sympathique et regardable pour peu qu'on fasse preuve d'une once d'ouverture d'esprit. 

D'ailleurs, vivement que je me procure un exemplaire du nouvel album afin de savoir qui a raison : les enthousiastes qui se réjouissent d'avoir de nouvelles histoires de leur héros préférés ou bien les tristes qui pensent qu'on aurait du enterrer Franquin avec tous les albums du monde pour être certain de bien respecter son souhait. 

Note : 2/5

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