Traquée - Quand Paul arrête de déconner

Combien de traductions de titres foireuses devrons nous encore subir ?

Alors celle-là, personne ne l'a vue venir ! Disney+ qui propose à la diffusion un film d'épouvante, au milieu de l'océan de séries Star Wars, Marvel et autres classiques animés, on peut dire que c'était inespéré !

Alors certes vous me direz qu'il y a un an et demi nous avions déjà eue la bonne surprise Prey qui avait apporté un vent de fraîcheur à la saga Predator tout en prouvant que Disney+ ne proposait pas que du contenu grand public, mais honnêtement depuis le match entre Amber Midthunder et la créature aux griffes acérées on ne peut pas dire que les contenus plus matures aient fleuris sur la plate-forme. 

Pourtant quelques jours après sa mise en ligne le 22 septembre dernier, Traquée (traduction incroyablement parfaite et fidèle de No One Will Save You putain les traducteurs étaient en grève avec les scénaristes ou bien ?) a fait un petit buzz qui m'a poussé à me tourner vers ce registre que je n'affectionne pas des masses (après une journée de taff passer 90 minutes à flipper n'est pas vraiment ma conception de la détente). Et puis pour une fois que Mickey nous propose un projet sans niaiseries on ne va pas refuser et donner sa chance à ce concept au budget modeste ! 

Comme quoi, l'acting ne passe pas forcément par les dialogues

Simple et épuré

L'histoire de Traquée est on ne peut plus basique : Brynn est une jeune femme vivant isolée dans une maison de campagne que ses voisins n'apprécient pas. Un soir elle est réveillée par un bruit métallique et constate rapidement qu'une créature est entrée dans la maison. 

On pourrait croire que ces quelques lignes ne suffiraient pas à garantir un bon suspense ni même un bon personnage principal, pourtant la réalisation de Brian Duffield va s'appliquer à travers quelques plans sur les billets écrits par l'héroïne ou par le comportement des quelques figurants à nous faire comprendre qu'un drame s'est joué par le passé. 

On comprend alors immédiatement que personne ne viendra au secours de Brynn parce que personne ne voudrait lui porter secours. Et savoir dès le début que la jeune femme va devoir affronter une invasion alien dans une maison isolée, sans arme et sans être taillée pour le combat va nous aider à éprouver de l'empathie pour la demoiselle. 

A ce titre Kaitlyn Dever se montre absolument parfaite et saura transmettre sa frousse et son courage avec une facilité déconcertante, le tout sans prononcer un seul mot ou presque car le film fait le pari de ne proposer aucun dialogue. La jeune femme avait crevé l'écran dix ans plus tôt avec son interprétation de Loretta dans Justified, elle impressionne à nouveau en faisant face seule à des ET sournois. 

Peur d'enfance

Parce que si le film va se montrer aussi prenant, c'est parce qu'il va exploiter les peurs que chacun a pu ressentir au moins pendant son enfance : la peur d'être tout seul, la peur du noir, la peur du monstre sous le lit et des envahisseurs. 

Le design des aliens est par ailleurs assez audacieux car assumant complètement d'évoquer les peurs de l'enfance en optant pour une représentation façon Roswell soit le look de martien le plus ancré dans l'imaginaire collectif.

Et en dépit de ces traits évoquant Paul ou Roger de American Dad, les créatures du film vont tout de même flanquer de sacrées frousses notamment au cours des vingt premières minutes avec une première confrontation où on retient notre souffle en même temps que l'héroïne. 

La première scène notamment parlera à chacun : vous descendez les escaliers et vous constatez que la porte est ouverte et qu'en prime une ombre rôde en contrebas... Que feriez vous ? 

L'intention du film est donc de jouer au maximum avec le côté madame tout le monde de son héroïne et de rendre les scènes d'action et réactions du personnage crédibles : ne vous attendez pas à la voir dégommer de l'alien à tout bout de champs. 

Par contre si vous espérez une partie de cache cache bien stressante, vous risquez d'être servis !

Bah mon vieux ça c'est de l'entrechats

Un budget bien employé

Le plus épatant dans tout ça c'est que nous sommes en présence d'un petit budget surtout si on le compare à la concurrence en matière d'horreur et de SF : 22 millions de dollars. Autant dire pas grand chose, mais cela n'empêchera pas les créatures d'être totalement crédibles.

Certes les bestioles sont en CGI, mais leurs pouvoirs et actions sont totalement réalisés à partir d'effets pratiques : meubles bousculées, portes ouvertes à la volée, son des pas sur le toit de la maison ou dans les escaliers, la présence des extra-terrestres est palpable et aucune séquence ne décevra bien que on ne va pas se le cacher la peur, la vraie va tout de même rapidement disparaître.

Parfois un peu trop épuré

Parce que si les aliens sont une franche réussite, ce ne sera pas le cas de leurs vaisseaux dont le design est vraiment simpliste avec une animation très curieuse qui ne donne pas l'impression de voir une soucoupe volante. 

Cela dédramatisera un peu cette invasion jusque là stressante, et les choses ne s'arrangeront pas lorsque les aliens ne chercheront plus à se cacher.
Le frisson est garanti pendant la première rencontre avec les entités, mais une fois la moitié du film passée le comportement des aliens a beau demeurer hostile, on ne flippe plus car on connaît à présent leur look et leur démarche (bien que des efforts soient faits pour que chaque bestiole ait une particularité). 

Fort heureusement le film ne sera pas non plus dénué d'intérêt avec un final plutôt audacieux et curieux ainsi qu'avec quelques séquences assez amusantes, notamment lorsque le réalisateur a la bonne idée de suivre un alien plutôt que sa proie. 

LE fameux cutter de Tchekhov

A la réflexion, on en fait peut être un peu trop autour de Traquée. 
Probablement que le tout dénote tellement de l'offre habituelle de la plate-forme qu'on le portera aux nues un peu trop vite comme un film ultra-stressant, ce qu'il ne sera finalement que pendant sa première moitié. 

Mais en dépit de ses quelques ratés sur la flotte alien et d'un dernier acte un peu flou, le film se révèle une sacrée bonne surprise qui n'a pas à rougir face à des concurrents tels que Sans un Bruit voir même certains Shyamalan tant la première demi-heure est un concentré de suspense couplés à de bons jumpscares.  

Espérons que cette fois il ne faudra pas attendre encore plus d'un an pour avoir un film de ce calibre sur la plate-forme. 

Note : 3/5