Mine de rien cela fait déjà deux ans que Mourir peut Attendre a débarqué sur nos écrans et que les fans de la saga 007 se sont disputés sur sa qualité.
Pour ma part en dépit de moments ratés et d'un méchant décevant j'avais plutôt adhéré à cet épisode et aux risques qu'il se permettait de prendre, risques qui étaient qui plus est cohérents vis à vis du reste des volets de l'ère Craig.
Mais tandis qu'on ignore toujours qui sera le prochain interprète de James Bond et qu'on se réjouit d'avance à la levée de boucliers qui en découlera quoi qu'il arrive je suis tombé par hasard sur un exemplaire de Permis de Tuer, soit le film de la saga que comme beaucoup de monde je détestais quand j'étais ado car trop éloigné de l'image que j'avais du célèbre espion so british.
Mais après cinq films au cours desquels Craig a humanisé Bond au maximum (plus vulnérable, puis coeur brisé, parent...) je me suis demandé si ce second et dernier épisode avec Timothy Dalton était aussi nul que ce dont je me souvenais ou bien s'il n'était pas tout simplement une évolution trop radicale du personnage après une douzaine de films légers avec Sean Connery ou Roger Moore ?
En avance sur son temps
De premier abord le scénario de Permis de Tuer ne diffèrerait pas spécialement de ce qui se faisait jusqu'alors dans la saga : un repaire secret, un trafiquant de drogues, des jolies femmes, des scènes d'action invraisemblables, des gadgets et un vodka-martini... Franchement on ne peut pas dire que l'intrigue soit très originale d'un point de vue strictement bondien.
Mais il suffira de quelques séquences pour que le film apporte une idée jusque là à peine survolée par les films précédents : impliquer émotionnellement James dans le scénario en lui ôtant des proches.
Dès le début lors du mariage entre Felix et Della notre agent semble mélancolique à l'évocation du mariage, on comprend que cet opus est conçu presque comme la suite directe de Au service secret de sa Majesté à l'issue duquel le personnage perdait sa femme.
Cette fois-ci Bond devra faire face à la perte de la femme de Félix et à la mutilation atroce de celui-ci par un narcotrafiquant sans pitié et sanguinaire.
Cela se traduira à l'écran par un 007 bien énervé qui n'hésitera pas à carrément envoyer péter le MI6 pour traquer le responsable du carnage tout en flinguant de sang froid chaque fois qu'il en aura l'occasion !
Une idée qui aujourd'hui semble excellente mais qui après les pitreries de Roger Moore n'a pas du être acceptée par grand monde. Dans le fond si Craig a pu imposer une vision plus humaine de 007, c'est parce qu'avant lui Pierce Brosnan avait lui aussi dépoussiéré le personnage avec des scènes d'action plus sérieuses et un savant mélange entre humour et drame.
Dans le fond Brosnan avait préparé le terrain pour Craig, alors que Moore et son costume de clown en train de taquiner un nain n'avait pas vraiment préparé le public à un James Bond capable de tuer des gens désarmés !
Le plus sombre et violent
Bien que le film accuse un âge de presque 35 ans il reste aujourd'hui encore l'épisode de la série le plus ouvertement violent de tous. Et on ne parle pas de quelques gouttes de sang ou d'un bodycount élevé façon Skyfall !
Le ton sera donné lors de la présentation du méchant campé par un Robert Davi froid comme jamais qui punira sa fiancée au nerf de boeuf tout en demandant à ses hommes d'arracher le coeur de son amant secret... Woups, vous êtes sûr qu'on est dans un Bond là ?
L'attaque contre les Leither sera elle aussi très explicite avec une baignade parmi les requins tandis que les hommes de main de Sanchez affirment clairement avoir procédé à un viol collectif de Della.
Bond de son côté rendra les coups avec la même cruauté en se débarrassant de ses ennemis parfois de façon bien dégueulasse ou avec une punchline bien sentie qui n'aura rien de drôle mais qui accentuera encore plus le ton résolument noir du film.
Certes il y aura bien quelques touches d'humour pour rappeler le côté so british de notre espion, mais ces touches seront rares et dénoteront presque avec le reste du film.
Une Bond Girl cool mais effacée
Une autre bonne idée du film consistera à appliquer ce filtre sombre aux personnages féminins. D'ordinaire cantonnées à êtres des greluches facilement séduites par notre espion préféré, les Bond Girls trouvent avec Pam Bouvier leur première représentante musclée !
Pilote de son état, la jeune femme va lors de sa première apparition sauver les miches de Bond avec un punch déconcertant pour une saga où les femmes n'étaient jusque là pas concernées par l'action.
Malheureusement après cette entrée en matière composée de crochets du droit, de coups de shotgun et de pilotage de hors bord, la jeune femme ... Tombe sans raison dans les bras de 007. Raaaah mais pourquoi ???
Sans vouloir surfer sur la vague pseudo féministe actuelle pourquoi avoir fait une introduction aussi badass de ce personnage pour finalement en faire une énième pouliche qu'on flanque dans son lit en deux minutes ?
Du coup Timothy Dalton, bon 007 ou non ?
Abordons à présent le point qui a toujours divisé les gens quel que soit la période choisie : l'interprète de 007.
Honnêtement Dalton ne sera jamais mon Bond préféré car il a des traits beaucoup trop sévères pour coller à l'image que je me fais de l'espion aux gadgets tandis que sa quasi absence de flegme et de vannes m'ont toujours gêné.
Et c'est dommage de ne pas l'avoir rendu un poil moins sombre car depuis que j'ai découvert l'acteur dans Hot Fuzz je me suis rendu compte que oui ce mec pouvait faire sourire avec une mimique ou une réplique bien sentie.
Mais d'un autre côté pour camper une version aussi sombre du personnage le gaillard était visiblement un choix pertinent car à aucun moment on aurait imaginé voir Connery ou Moore faire le quart de ce qu'il fait dans le film.
Permis de Tuer n'est pas un Bond parfait et objectivement sa construction n'a rien de bien mémorable.
Mais il serait de bon ton de le réhabiliter car aussi noire soit-elle le film a une âme et sort incontestablement du lot.
Et puis bien que je ne m'y sois pas vraiment attardé les scènes d'action ont beau être parfois un peu courtes, on tient malgré tout quelques morceaux de bravoure qui n'ont pas à pâlir face à la concurrence de l'époque, on pense notamment à cette longue confrontation finale dans le repaire de Sanchez qui aboutit à une course poursuite en camions citernes assez épique !
En fait le vrai problème de Timothy Dalton, c'est d'être arrivé après Roger Moore et d'avoir été trop brut dans sa relecture du personnage.
Nul doute que si le film était sorti après les épisodes de Brosnan il aurait été bien mieux accepté par le public.
Note : 3.5/5