Je me rappelle encore l'excitation que j'avais en juillet 2021 lorsque le messie tant attendu allait enfin être projeté en avant première ! Dix ans d'attente pour une séance spéciale puisque le passe sanitaire chéri allait entrer en vigueur le lendemain, bref j'avais on ne peut plus savouré ma séance de Kaamelott Premier Volet !
Mais à présent que deux années se sont écoulées et que le deuxième volet semble se faire désirer (Alexandre Astier espérait un tournage au printemps 2023 mais a priori il n'en fut rien) je me suis dis qu'il fallait que je revoie le film à nouveau car la hype avait peut être obscurci mon jugement : beaucoup de monde n'a pas du tout aimé le film alors que les six saisons de la série sont encore aujourd'hui citées aux quatre coins du net et au comptoir de tous les pubs de Bretagne jusqu'à ceux du Sud !
Du coup, une fois la hype bien passée est-ce que ce premier volet de la trilogie est une réussite totale comme je l'avais pensé à l'époque ?
Des efforts de réalisation
Après six saisons sur le petit écran dont les deux dernières en dépit de leurs ambitions souffraient d'un montage frôlant l'amateurisme (on ne présente plus les innombrables fondus enchaînés qu'Astier affectionne tant) l'arrivée de notre roi Arthur préféré au cinéma avait de quoi faire peur.
En effet la précédente réalisation d'Alexandre Astier sans être mauvaise sentait bon le téléfilm de luxe tandis que la promo avait été très discrète pour finalement s'accélérer trois semaines avant la sortie et dévoiler des images prometteuses.
S'il y a un point sur lequel on ne pourra pas dresser de reproches à Astier c'est bien sa mise en scène qui s'est clairement améliorée depuis David et Madame Hansen et les dernières saisons de la série !
Qu'il s'agisse des décors naturels parfaitement captés ou encore du nombre de figurants, on ne ressent plus le côté un peu fauché de la série tandis que Astier a enfin compris qu'un raccord pouvait se faire autrement que par un fondu à la con ! Les flashbacks assez nombreux s'insèrent à chaque fois à la perfection grâce à un objet ou une parole qui rappellera sa jeunesse à Arthur.
On pouvait d'ailleurs craindre que les CGI soient foireuses à la vue du plan un peu triste de l'armée burgonde au pied du château, mais hormis sur ce plan les effets spéciaux se montrent plutôt convaincants et permettent de rendre Kaamelott plus grande ! La forteresse est très réussie et les effets de destruction lors de la bataille finale seront plutôt réalistes malgré une 3D voyante.
Des retrouvailles efficaces
Mais là où j'attendais Astier, c'est sur sa capacité à jongler parfaitement entre les personnages à travers des dialogues redoutables.
Et étant donnée la galerie de personnages que les six ans à la télévision ont constituée cela ne serait pas une mince affaire !
Pourtant non seulement Astier est arrivé à caser 95% du casting original (seuls manquent Gauvain, Ygerne, Demetra, et le Maître d'Armes pour les plus importants) mais en plus il ne s'est pas reposé sur ses lauriers et nous a proposé une belle brochettes de nouveaux venus.
La nouvelle table ronde préparée par Bohort fait ainsi intervenir le temps d'une séquence des noms qui seront certainement réutilisés pour les suites tandis que les saxons se trouvent un chef inattendu et charismatique à souhait en la personne de Horsa, interprété par Sting en personne !
On pourrait la première fois trouver les nouveaux un peu lourdauds car en toute sincérité on attendait surtout de retrouver Perceval, Merlin, Léodagan, Lancelot, la Dame du Lac ou le Roi Loth, mais quand on y prête attention on découvre de jeunes acteurs qui visiblement s'éclatent et qui en prime sont dans le ton.
Mais évidemment on se régalera en retrouvant les plus bêtes et les plus méchants (sans rire je trouve que Astier s'est donné à fond pour les répliques du conseil de Lancelot) à travers des dialogues qui s'ils n'ont pas le même mordant qu'à l'époque sauront quand même coller de nombreux rires pendant la projection !
Des choix artistiques discutables et audacieux
Par contre si la réalisation d'Astier a grimpé de nombreux crans et qu'en prime il nous a composé une bande son purement impériale (si si, réécoutez là et vous entendrez qu'on est presque dans Star Wars par moments) on ne peut pas dire que la réussite fut totale et en ce sens on pourra aisément comprendre que les costumes en aient rebutés un bon nombre.
Passer des chevaliers en armure et aux costumes grattés sur le tournage de la série Rome et de La Passion du Christ aux tenues des burgondes façon Tintin et les Picaros est effectivement assez choquant.
Alors que les costumes du film s'inspirent parfois de Game of Thrones, Astier a choisi de tomber dans l'excentricité tout au long du film : la coiffe de Guenièvre, le look des gardes du Rocher et surtout l'armure étrange de Lancelot (qui sera développée dans le second volet d'après le réalisateur) apportent un réel décalage comique qui ne fut pas au goût de tous.
A titre personnel j'avoue que si je trouve les tenues burgondes parfois magnifiques un peu moins de fluo et de paillettes n'auraient quand même pas été de refus.
Une fantasy qui peine à décoller
Les costumes, on aime ou on déteste c'est selon les appréciations de chacun... Par contre avec le recul il y a tout de même un aspect sur lequel il y aura tromperie sur la marchandise, à savoir le côté épique et fantasy que Alexandre Astier nous a vendu pendant la promo.
Alors oui les panoramas et décors sont excellents et ont permis à Kaamelott de devenir l'un des plus beaux films français de la décennie, mais en matière de spectacle pur on ne peut pas dire qu'on ait été gâtés.
Je ne m'attendais évidemment pas à des affrontements façon Gladiator, mais les deux trois scènes d'action du film sont franchement scandaleuses de facilité et sonnent pour le coup très cheap. L'embuscade Saxonne dans la forêt de Gaunes ou encore l'arrivée fracassante de Perceval à la tour seront il faut bien l'avouer deux moments assez gênants du point de vue de la mise en scène. Au moins, c'est drôle !
Même chose pour la fantasy : Astier nous récompense à la fin du film avec une dizaine de minutes riches en coups de catapultes ainsi que des plans qui s'attardent bien sur Excalibur pour montrer à quel point son nouveau look est putain de stylé, mais hormis lors de l'avant dernier plan il n'y aura aucune réelle fantasy.
On savait pour la série que les créatures, démons et affrontements étaient hors champs pour des raisons de budget, mais étant donné ce que les bandes dessinées montrent en matière de monstres et d'affrontements on était en droit d'espérer bien plus pour le film.
D'évidentes questions en suspens
Cependant il faudra nuancer une partie de ces critiques avec un argument de taille que les gens n'ont pas souvent à l'esprit : il s'agit du début d'une trilogie.
Ainsi il était plus qu'évident que de nombreuses questions resteraient sans réponses et que certaines curiosités ne seraient pas expliquées d'emblée.
L'armure de Lancelot, la présence du Père Blaise chez l'ennemi, l'absence de Yvain ou encore les nombreux personnages qui quittent subitement le film sans explication... Etant donné le sens du détail qu'a Astier avec sa franchise depuis le début, je ne peux pas croire que tous ces trous dans le scénario ne soient qu'une paresse. On attendra évident de voir les deux autres segments avant de se prononcer pour de bon sur le sujet... Et par pitié si Monsieur Astier me lit : on les veut ces deux suites, où sont-elles ?
Du coup c'est raté, surfait ou bien est-ce vraiment génial ?
Après cette nouvelle vision, Kaamelott Premier Volet présente effectivement de réels défauts que je n'avais pas franchement soulignés à l'époque de la sortie.
Pour autant ces défauts en font-ils un ratage ou une bouse comme certains n'hésitent pas à le qualifier ? Bien sûr que non d'autant plus que les soucis de scénario seront certainement corrigés par la suite, tout ne sera ainsi qu'affaire de patience.
Le seul vrai problème du film est qu'il n'atteint pas vraiment le degré de culte de la série et que les dialogues aussi efficaces soient-ils n'ont pas le même piquant qu'à l'époque de la série. On se récite toujours les disputes des paysans ou les injures du Maître d'Armes, mais on ne place pas les répliques de Quarto ou des nouveaux chevaliers... Dommage mais comme dans toute bonne partie de Robobrole en trois manches, il reste encore deux films pour transformer l'essai. Et vu le temps que met Astier pour les écrire nul doute qu'il nous prépare un truc millimétré au poil de fion !
Note : 3.5/5